Avis expo : Toulouse-Lautrec, résolument moderne

Au Grand Palais

Du 9 octobre 2019 au 27 janvier 2020

Toulouse-Lautrec est l'un de ces peintres inclassables, notamment parce qu'il n'appartient à aucun mouvement : tout juste peut-on le placer dans la catégorie un peu fourre-tout des post-impressionnistes. Son style unique, ses portraits mordants mais dénués de cruauté, sa maladie, ses origines aristocratiques, sa prédilection pour la représentation d'un Montmartre populaire et artistique, tout concourt à faire de ce peintre un artiste singulier. 

Il était donc logique que le Grand Palais consacre une nouvelle exposition à Toulouse-Lautrec, sa dernière grande rétrospective datant de 1993, dans ce même musée. Une scénographie particulière a été créée pour présenter au public pas moins de 228 oeuvres,  provenant de musées et de collections privées.  

Permettez-moi ici de partager avec vous une théorie personnelle sur les expositions : selon moi, un spectateur doit en ressortir soit émerveillé, soit avec les idées plus claires sur un sujet, soit avec l'envie d'en savoir davantage. Et bien entendu, réussir à réunir les trois conditions serait le nec plus ultra. Pourquoi vous dis-je cela? Parce que pour moi, Toulouse Lautrec : résolument moderne n'a coché aucune de ces cases. J'en suis ressortie profondément déçue. 

La qualité d'une exposition - j'en ai la conviction - tient souvent moins aux oeuvres exposées qu'à la façon de les montrer, de les raconter, de souligner leur spécificité, de les remettre dans un contexte culturel et historique qui renforce leur seule valeur esthétique. Il s'agit donc d'agencer les oeuvres par ensembles qui font sens, et de développer une certaine pédagogie, et non simplement de les mettre côte côte, comme j'en ai eu trop souvent l'impression ici. 

La scénographie de l'exposition a été très étudiée mais je n'y ai trouvé aucun intérêt. Elle ménage des espaces immenses -  prévus pour accueillir la foule que ne manquera pas d'attirer un nom comme celui de Toulouse-Lautrec, - ouvrant des allées bien trop grandes pour la taille des oeuvres, devant lesquelles il faudra de toutes façons probablement jouer des coudes.

J'ai eu l'impression d'une exposition interminable, et pourtant, je l'ai visitée dans des conditions de rêve, puisque nous n'étions qu'une poignée de visiteurs. 228 oeuvres, lorsque l'on veut tout regarder avec attention, c'est beaucoup trop, même quand on a l'habitude de sillonner sans relâche expositions et musées.  Au bout de près de deux heures de visite, lassée, j'ai pour ainsi dire simplement jeté un oeil aux deux dernières salles. 

Côté qualité des pièces exposées, en revanche, rien à redire : on retrouve une bonne partie des oeuvres emblématiques de Toulouse-Lautrec, comme les panneaux représentant la Goulue ou encore l'affiche pour Aristide Bruant, toute l'animation du Montmartre des plaisirs, au milieu d'oeuvres plus intimistes comme ces femmes à la toilette, à mi-chemin entre une peinture réaliste de la vie quotidienne, et ce que d'aucuns pourraient qualifier de voyeurisme. Il y a quelque chose de vif, de caricatural sans être vraiment cruel dans son oeuvre, et un style très particulier qui ne ressemble à aucun autre. 

Finalement, ce qu'il m'a vraiment manqué, ici, c'est une logique d'exposition claire. Soit chronologique, qui aurait permis de voir l'évolution de son trait dans le temps, soit thématique - le choix a priori retenu ici - mais des thématiques claires. Pourquoi des titres aussi fumeux que "tout l'intéresse", "un naturaliste de combat" ou encore, "vite"? Des titres que les panneaux d'explications commentent vaguement, sans vraiment donner de grandes idées sur le peintre.

Avec un sous-titre comme "résolument moderne", on s'attendait pourtant à se voir démontrer toute la modernité de Toulouse-Lautrec, par comparaison avec ce qui se faisait à l'époque, dans le choix de ses sujets, ou encore dans le style de son trait : peu importe l'angle choisi, à condition d'en proposer un.  

Au final, je me suis ennuyée à cette expo. j'ai regardé avec attention toutes les pièces exposées, lu tous les panneaux, et n'en ai rien retiré de plus que la seule admiration des oeuvres. Un peu dommage, lorsqu'on est pas spécialiste de ce peintre, de n'en rien apprendre en allant voir une exposition qui lui est dédiée... 

J'en viens à me demander pour quel public est prévue cet exposition ? Ni vraiment pour les néophytes, ni pour les spécialistes, interminable, décousue, pas vraiment pédagogique. La sensation assez désagréable d'une grosse machine faite pour attirer le public plus que conçue à destination du public. 

A visiter uniquement si vous souhaitez voir un maximum d'oeuvres de Toulouse-Lautrec réunies au même endroit ! 

La note tout à fait subjective et qui n'engage que moi : 2/5

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