Vous le savez peut-être, mais j'ai une tendresse toute particulière pour le Théâtre des Champs Elysées, car c'est la salle que je fréquente le plus assidûment et où j'ai entendu en récital la plupart des voix actuelles qui m'ont fait découvrir l'opéra. Parmi ces voix, Il y a trois ténors que j'ai littéralement écouté en boucle, dans les premiers temps un peu obsessionnels de ma découverte de cet art : Rolando Villazón, Jonas Kaufmann et Vittorio Grigolo. Après avoir entendu les deux premiers sur scène, l'an dernier, il ne me manquait que le troisième. On aura beau dire, les enregistrements sont beaux, mais rien ne vaut d'écouter une voix en concert, telle qu'elle est, sans retouche ou reprise possible, avec tous les risques et les imperfections que cela peut comporter. J'y reconnais des accents familiers, un timbre cent fois entendu, mais il y a la magie de la présence, du jeu, et l'émotion brute véhiculée par l'artiste. Bref, c'est toujours avec une grande émotion que je pars à la rencontre de celles ou ceux qui m'ont fait rêver, mêlée d'un peu d'appréhension : et si c'était moins bien que dans mon souvenir ? 

 

Je suis une habituée du 2e balcon côté, et en tire une sensation grisante : celle de surplomber la scène et de pouvoir m'offrir, pour une somme raisonnable, une part de rêve. C'est donc encore une fois encore du haut du théâtre que j'admire le lustre art déco qui illumine la salle et qui, vu d'ici, semblerait presque à portée de main.

 

Lorsque Grigolo entre en scène, je ne ménage pas mes applaudissements, et tombe sous le charme. Si la voix est encore un peu voilée en tout début de récital, elle s'éclaircit rapidement pour retrouver le timbre que je lui connaissais. Le programme d'airs italiens et français entièrement consacré à l'amour a de quoi séduire, et le ténor italien sait en jouer à merveille. Passant avec aisance des instants les plus poignants où sa voix emplit la salle, à des pianissimo plein de douceur et de sensualité, il exprime toutes les facettes du sentiment amoureux avec beaucoup de sensibilité. Ce n'est qu'au troisième bis qu'il quitte la salle, après un E lucevan le stelle qui m'a tiré quelques larmes et la standing ovation d'un public conquis.

 

Ce concert se conclut par une rencontre le temps d'une dédicace et d'une photographie, avec cet artiste aussi talentueux que généreux. Avouons-le, je suis rentrée un peu rêveuse, la tête dans les nuages, en priant pour vivre encore des soirées lyriques aussi inoubliables.

 

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